« Le plastique n’est pas un déchet comme les autres » MoHoDebate

Dans le cadre de notre initiative « Deplastify The Planet », MoHo a organisé, le 31 mai dernier son premier MoHoDebate à Paris sur le thème de la pollution plastique avec Nathalie Gontard, chercheuse à l’INRAE et Alexis Dusanter co-fondateur de Bocoloco.

Quelques éléments forts de cet échange avant la vidéo.

Le plastique est il est un objet commun ? Et ensuite un déchet comme les autres ?

On associe souvent la pollution plastique à son empreinte carbone pourtant le plastique est un déchet à part qui a sa propre pollution : des particules de plastiques. C’est une forme de vieillissement très particulier où le plastique va se fragmenter sur un temps très long sans pour autant être inerte. Il est ainsi capable d’absorber les substances qu’il va rencontrer. En particulier les substances hydrophobes, particulièrement dangereuses pour l’environnement et la biodiversité. Par ailleurs, ce déchet, à sa taille nanoscopique, traverse les membranes des organes des êtres vivants, il va s’intégrer dans les organismes sans être reconnue comme un corps étrangers.

C’est donc une pollution particulière, qui va au delà de l’empreinte carbone. Il a sa propre empreinte, une empreinte plastique.

Peut on faire confiance au recyclage ?

La notion d’économie circulaire et de recyclage ne colle malheureusement pas avec la particularité de ce matériau. Le plus belle exemple d’économie circulaire est offert par la nature. Rien ne s’accumule car notre écosystème possède les outils pour les dégrader et nourrir d’autres organismes qui peuvent ainsi se renouveler sans résidus permanents. Sauf que le plastique ne se prête pas à cela. C’est un matériau qui se dégrade, s’abime, reste et s’intègre dans l’environnement sans être digéré. On le retrouve dans l’air, l’eau, les êtres vivants.

Souvent lorsque l’on associe recyclage et plastique, on prend l’exemple des bouteilles PET. Cependant, le cycle de recyclage d’une bouteille en PET (1% des plastiques utilisés) est limité. La bouteille ne redevient bouteille en PET qu’un certain nombre de fois. Par ailleurs, chaque nouvelle bouteille exige près de 70% de plastique nouveau. Lorsqu’un industriel annonce qu’une bouteille est recyclée, en vérité elle a nécessité l’injection de plastique vierge à 70%.

Comment alors peut-on alors annoncer des chiffres de recyclage de 20% ? Car le recyclage intègre plutôt du décyclage c’est à dire le fait de réutiliser le plastique dans un nouvel objet. Cette démarche ne créé donc par une boucle circulaire car elle doit être en permanence être alimentée. Cette logique impose un besoin de plastique vierge régulier. Surtout, on va chercher de nouvelles débouchées donc étendre les nouvelles utilisations du plastique. Enfin, tous les objets qui ont fait l’objet de décyclage ne sont plus recyclable. La pollution ne disparaît pas mais se stocke sous d’autres formes d’objet. Selon Nathalie Gontard, on devient ainsi dépendant de filières de recyclage plastique, filières exigeantes encore en plastique au dépend de filières verre, bois… Le recyclage a un vrai impact sur la pollution plastique. Le décyclage pérénise le système du toujours plus de déchets plastique.

Une partie importante du déchet plastique part dans des pays à qui on impose la création de filières de décyclage. Ces pays sont inondés du plastique occidental alors qu’ils n’ont pas la capacité de traiter l’ensemble et supportent des investissements dans des filières qui ne solutionnent en rien le problème. L’une des solutions seraient de respecter strictement la Convention de Bâle en interdisant strictement le fait d’exporter ses déchets plastiques et en imposant ainsi de les traiter au sein mêmes des pays consommateurs.

L’objet plastique n’est pas un objet anodin et son empreinte réelle n’est pas intégré au coût.

Ainsi tous les déchet plastique sont avant tout une dette, un mauvais héritage qu’on lègue à nos enfants.

Si on maintient notre consommation telle qu’elle est, nous avons accumulé environ 9 milliards de tonnes sur terre alors que la biomasse sur la terre est de 2 milliards. Et si ces plastiques ne sont pas brûlés, ils vont nécessairement devenir des micro plastiques et donc s’intégrer à l’environnement et au Vivant.

Dans la suite de cette conférence, Nathalie Gontard et Alexis Dusanter reviennent sur des solutions, technologiques et comportementales pour diminuer l’impact de cette pollution.

Une chose à retenir malgré tout. Le plastique qui s’est inscrit dans notre quotidien par sa simplicité, sa commodité, son prix génère un immense coût caché. Il a transformé nos habitudes jusqu’à remplacer des comportements évidents et bénéfiques. Le retour de la consigne est une solution. La création de formats (bouteille, récipient…) standardisés en est une autre pour faciliter le traitement.

La solution la plus évidente reste de ne pas considérer le plastique comme un matériau normal. A partir de cette « ligne », il faut accepter que son utilisation devienne une « exception », une contrainte dont on mesure l’impact désastreux sur l’écosystème et dont il faut impérativement diminuer la consommation.

Merci à RaiseLab pour leur accueil, Romain Saillet pour la prise vidéo. Retrouvez la conférence sur la chaîne YouTube de MoHo dans quelques jours.

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